jeudi 18 septembre 2008

Brave gars

J'ai presque un défaut, un défaut qui ne gêne que moi (beaucoup de mes défauts ont cette caractéristique-là, c'est une de mes qualités): quand une émission coul passe à la télé et que je suis claquée je préfère tenir encore un peu grâce à mes réserves d'énergie cachées et regarder l'émission en question plutôt que de dormir. Une bonne émission ça me tient toujours en éveil. Hier quand j'ai appris que Bégaudeau et Laurent Cantet seraient chez Taddéi je me suis arrangée pour être à l'heure au rendez-vous : en pyjama, les devoirs faits, la douche prise, la bouffe au fond du ventre, les réveils programmés. Tout était bien.
L'entretien était ensorcelant, un vrai petit gâteau au chocolat pour le cerveau. D'un côté Laurent Cantet et sa tête qu'il n'arrête pas de secouer, de l'autre, Bégaudeau qui lui n'arrête pas de la pencher, au milieu, Fred qui a comme à son habitude overbossé le sujet.
Le miracle : l'éloquence inégalable de Bégaudeau, sa façon si musicale de dérouler les vérités, de viser juste, autant dans ses idées que dans le choix de son vocabulaire, le recul sincère et évident qu'il possède par rapport à l'ensemble du lot que constitue "Entre les murs" : le livre, le scénario, son jeu d'acteur, la Palme d'or.
Autant dans "Ca balance à Paris" j'ai toujours bien envie de le tabasser, autant ici je le trouve trop séduisant, à croire que ça réussit toujours mieux aux gens de créer plutôt que de commenter les créations.
Le lendemain, sentant que j'allais être interrogée en philo je me suis donné du courage en pensant à la rhétorique de François, en me promettant de l'imiter si jamais le prof annonçait "Mademoiselle Joudet, je vous écoute". Finalement c'est tombé sur Rafael, je me suis penchée vers Julie et je lui ai susurré "j'en étais sûre...c'est parce qu'il est arrivé en retard".

La vidéo de l'émission



Entre les murs, le livre

L'idée du livre était assez simple: une année, une classe, un prof de français, un point de vue. Faire le bilan d'un milieu qu'on imaginait en crise, comme le reste, en crise et d'une crise à la mode, qui pouvait intéresser. Le résultat était un peu faible, assez inutile, proche du degré zéro de l'écriture et surtout du degré zéro de l'effort d'écriture, dépassant rarement celui du simple procès verbal : constatations, déclarations d'une situation.
Tout s'éclipse devant ça, même le style, et sous prétexte que François donnait déjà beaucoup en choisissant le prisme illusoire du réalisme il ne fallait donc pas lui en demander plus, l'objectivité, si rare de nos jours, encore plus rare quand on parle de ce qui se passe "entre les murs" d'une classe, suffisait à justifier son projet. "Il n'y a pas de style mais il y a autre chose", et le lecteur qui baille entre les...lignes. La réalité n'a pas de style, c'est peut-être pour ça qu'elle est si chiante, et de me rappeler une phrase de Matzneff, "Un écrivain c'est une pensée soutenue par un style". Ouais je sais elle est coul.

Entre les murs - François Bégaudeau, 289 pages, Folio, 6,30€

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