mercredi 31 décembre 2008

"Quand on aime la vie, on ne lit pas."

Ce n'est pas une biographie mais un essai où l'on essaye d'aller au fond des choses, de tirer le portrait et le bilan d'un homme qui a écrit. Mais en lisant ce livre on se rend très vite compte qu'il est d'abord un portrait en creux de l'oeuvre de Michel : tout les partis pris de Lovecraft sont l'exact inverse des partis pris de Michel Houellebecq.
Il y a cet homme qui a pour discipline de n'écrire que par pur dilettantisme là où l'autre se rend compte qu'il gagne suffisamment avec ses livres pour ne plus travailler. (Ennemis Publics) D'un côté, un homme qui refuse de s'abaisser à parler d'argent et de sexe dans ses livres et qui préfère ne voir en l'homme qu'une usine à sensations. De l'autre, sexe et argent, thèmes essentiels dans l'oeuvre houellebecquienne, l'idée de libéralisme sexuel constituant le fil rouge de toute son oeuvre.
Houellebecq doit à Lovecraft l'insertion de descriptions scientifiques au sein du roman pour expliquer sentiments et comportements, ce qui a pour effet de réduire l'homme à ce qu'il a de plus animal en lui ou pire encore, à un ensemble de particules élémentaires. Il y a dans ce bref essai l'extrait d'une lettre envoyée à la seule compagne que Lovecraft a eu, elle peut faire penser au commentaire qu'aurait pu faire une voix-off par-dessus les images d'un accouplement humain. Houellebecq aime bien user de cette écriture documentaire pour parler de l'homme, il sait alors qu'il fait mal et que devant la véracité de ses propos rien ne pourra lui être objecté. Dans cette lettre on retrouve aussi le thème cher à Michel de la lente dégradation des corps, Lovecraft de toute façon a choisit de voir le corps comme un simple lieu traversé de sensations provoquées par des situations qu'il prend plaisir à décrire pendant que Houellebecq voit en sa dégradation l'origine de tout les malheurs humains,
"il ne reste plus que la maladie, la vieillesse et l'attente de la mort". Ce sera fascination morbide contre omission volontaire. Dans le roman houellebecquien l'état du corps influe directement sur la nature des sentiments. La jeunesse est le seul moment du bonheur, la vieillesse est le moment d'une souffrance sans nom et sans répit. Ce qui donne lieu à la contemplation fascinée de la décrépitude des corps qui va de pair avec un dégoût amer à l'égard d'une société aux codes dictées par le jeunisme, ce qui prive définitivement ses personnages vieillissants de tout accès à l'amour et au bonheur. Le roman houellebecquien sera l'occasion d'une parenthèse d'espérance, l'illusion d'un secours divin pour ses personnages, jusqu'au retour à un désespoir encore plus lourd qu'au début.
"Jeunesse, beauté, force; les critères de l'amour physique sont exactement les mêmes que ceux du nazisme."
On comprend que Lovecraft choisit le fantastique pour mieux refuser le réalisme, l'estimant sans intérêt, primaire et méprisable. Le fantastique comme un refus, ou comme un refuge.

vendredi 19 décembre 2008

Lacrimosa au Théâtre du Rond-Point,
Tentative d'épuisement du sujet Charlotte


La scène est bleu, des néons par terre, quatre cinq chaises, peu de gens dans le public, une cinquantaine de personnes? La pièce commence à 19h01, à 19h01 la fille vient nous dire d'éteindre nos portables, deux secondes après noir total et Régis Jauffret qui entre par le fond. Chemise bleu, costume noir, il s'est coupé les cheveux depuis la dernière émission de Taddéi, j'attendais qu'il le fasse, ça faisait beaucoup trop ringard, quelque part ça me rassurait, on craint toujours la laideur, même d'une coupe. Je ne pense pas le trouver beau, ou alors je me force. Son visage est vide, il a les cheveux et le look de mon ancien prof d'histoire géo. Il commence tout de suite, comme les films dans les petites salles, tu parles à ton voisin et d'un seul coup tu dois te taire et te mettre en condition. Son jeu est guindé et il tente le naturel par dessus le guindé, catastrophe, mais plus ça avance et mieux ça se passe. L'histoire : son ex, Charlotte, s'est suicidée en 2007, c'est un dialogue : il parle d'elle, elle lui répond.
la rencontre au Salon du Livre, elle lui parle de Univers, Univers "à force de le relire j'ai le sentiment de l'avoir écrit", j'ai pensé "je savais qu'on pouvait trouver l'amour au Salon du Livre", ça me semble être une évidence, j'y ai toujours cherché quelqu'un là-bas, on se sent pris dans un village, on croise des écrivains connus marchant sur la moquette rouge, on sait que c'est naturel, que pendant 4 jours c'est normal.
3 mois de mails avec Charlotte
15 jours où ils s'appelaient chaque soir
le restaurant, "tu as commandé un fondant au chocolat"
chez lui "les voisins du dessus avaient finit de faire l'amour au moment où nous commencions"
les matins heureux
"tu m'empruntais une paire de chaussettes à motifs jacquard et une chemise trop grande pour tes épaules dont tu pliais les manches jusqu'aux coudes, tu disais "comme ça je te porterai toute la journée". "tu étais pressée et tu partais en rigolant"
le voyage à Djerba, "on est parti se baigner en gardant un oeil sur les valises"
Faire parler Charlotte c'est se protéger des critiques probables, elle est la conscience qu'à Jauffret de recycler quelque chose de profondément personnel et douloureux à des fins littéraires, ce n'est même pas son histoire, "c'est dégueulasse", il le sait, il le dit, il devient invincible. Il tient entre ses mains un petit cahier avec une couverture cartonnée, c'est sa deuxième mémoire et on lui pardonne : il n'est pas comédien et personne d'autres que lui ne pouvait jouer ça. Quelques phrases sont soulignées au Stabilo rose, ça on le voit bien, d'où on est on peut tout voir, c'est comme si on était à 2cm de lui. Parfois il se penche pour saisir un verre d'eau et on se demande comment il fait pour boire puisqu'il ne penche pas le verre et qu'il l'enlève tout de suite après l'avoir touché de ses lèvres, ensuite il prend son pouce et son index et essuie ses lèvres, légèrement tendues vers l'avant, comme pour un baiser, pour les éloigner du reste du visage. Il boit une dizaine de fois, il ne se sèche pas systématiquement les lèvres, j'ai l'impression qu'il a trop conscience de boire et qu'il ne sait plus boire. Parfois il dévisage le public et il me regarde sans le savoir, pendant quelques secondes, il a les yeux bleus cheap, j'essaye de le sourire, peut-être que mes dents brillent dans l'obscurité et qu'il comprend.
Dans un monologue, la dernière phrase est importante : elle doit être poignante, tout résumer, c'est celle qu'on emportera avec nous, la dernière phrase c'est Charlotte qui la prononce: "je suis fière de toi" et tout s'éteint. Jauffret doit en avoir la chair de poule de cette phrase et de ce noir, peut-être qu'à force cette histoire larmoyante le lasse, qu'il en a trop dit, qu'il l'a trop joué, qu'il déteste Charlotte, qu'il s'en lasse comme il aurait pu s'en lasser si elle avait encore été vivante, alors ça marche et il ne la regrette plus, "ce livre c'est une thérapie" il aurait pu dire. Il ne la regrette plus à part peut-être au moment de cette ultime phrase où il sent vraiment qu'il n'a pas été le seul à l'écrire ce livre, il fait quelque chose de son suicide, elle fait quelque chose de son talent. "Je suis fière de toi" à 20h02 et deux rappels où Jauffret semble de plus en plus gêné, il ne sait pas quoi faire de son visage et de ses mains, aussi guindé dans le jeu que dans l'émotion spontanée de l'écrivain qui redevient l'écrivain, le salut est le moment du retour au réel, des gratifications. Je suis sortie, j'ai pris le chemin qui passe derrière la scène, j'avais pour idée d'y croiser Jauffret, de lui parler et d'aller au restaurant avec lui, commander un fondant au chocolat.

Lacrimosa au Théâtre du Rond-Point, écrit, lu et interprété par Régis Jauffret, du 5 au 30 décembre, 19h00.

dimanche 23 novembre 2008

Quatre nuits avec Anna - Jerzy Skolimowski


D'abord rôder autour de chez elle et n'apprécier que ce qu'elle donne à voir par la fenêtre : des seins opulents, des sous-vêtements qui sèchent, une chaleur féminine à laquelle l'Homme donnerait tout pour y assister, y participer. Un jour, il passe un bras par la fenêtre et saisit le pot de miel servant désormais de sucrier. Il achète le même miel, le vide, y glisse un mélange de somnifères appartenant à sa grand-mère morte pendant le film et de sucre qu'il va ensuite placer à la place de l'ancien. Comme il est méticuleux il fait en sorte que le sucre soit au même niveau que l'ancien dans le pot, le travail est bien fait, d'une précision effrayante.
Chaque soir il s'assure que la Femme prenne bien sa tasse de thé sucré, quand elle dort il pénètre dans la chambre et trouve à s'occuper par de petites attentions désintéressées, d'une générosité à couper le souffle : recoudre le bouton branlant de sa chemise, lui finir le vernis des ongles de pieds, faire la vaisselle le soir de son anniversaire, lui glisser une bague entre les doigts achetée avec son dernier salaire. Chaque soir c'est l'Homme qui dit à la Femme "je veillerai sur toi à condition que tu boives ton thé", et elle le boit et chaque soir il entreprend de construire un peu plus une intimité qui s'évapore avec le jour. La maison d'Anna est petite, la pièce est chaleureuse, d'une décoration de mauvais goût qui rendrait crédible l'histoire, à l'opposé de la grotte négligée dans laquelle notre héros passe ses journées, mais y a-t-il réellement une importance à tenir sa maison quand on estime vivre chez sa voisine.
Au final la femme pardonne parce qu'elle comprend le désir que son corps, son intimité et sa solitude peuvent susciter. Son regard est sans animosité mais elle rend la bague et promet de ne plus jamais revenir, la fin est brutale pour le spectateur autant que pour notre héros.

C'est à cheval entre l'intimité clair-obscur d'une chambre et les paysages ravagés et au ciel trop blanc d'un village polonais que se déroule "Quatre nuits chez Anna", c'est au MK2 Hautefeuille que vous pouvez encore le voir.

mercredi 19 novembre 2008

couleur soupe au potiron


The mysterious production of eggs est sorti en 2004.
J'allais tout les dimanches soirs à la Fnac des Champs-Elysées pour écouter la première chanson de l'album qui est longtemps resté sur les bornes d'écoute et puis il a bien fallu que je me résolve à l'acheter, 18€. J'ai beaucoup de souvenirs avec cet album, je me souviens d'avoir attendu très très tôt devant la Cigale le jour du concert, un mec était venu me demander ce qui se jouait ce soir, ensuite il m'a demandé mon âge, j'ai dit "13 ans", il m'a sourit, il est parti.
J'étais seule, je portais un pantalon en velours marron et une chemise en mousseline de soie, mes lunettes toutes rondes à cause du soleil, j'avais un look bizarre mais je ne l'étais pas spécialement.
La fosse avait été recouverte de sièges et Andrew Bird jouait du violon, il avait annoncé son titre "a nervous tic motion of the head to the left " en français et dont la traduction m'échappe aujourd'hui, il avait aussi repris une chanson de Dominique A.
Ma mère était venue me chercher et je n'avais pas d'argent pour m'acheter le t-shirt, elle ne voulait pas m'avancer, prétextant que je ne savais pas gérer mon argent et que ça m'apprendra. Dur.
Je me souviens aussi d'avoir attendu dans la voiture devant un Buffalo Grill en écoutant Masterfade et en regardant des arbres défeuillés. Je n'ai jamais ressenti le besoin d'écouter un autre album d'Andrew Bird, "The mysterious production of eggs" est la chose la plus belle qui soit, un album que j'aime comme une personne et qui me rappelle cette période si spéciale de mes 13-15 ans ou j'ai le sentiment d'un désert de solitude parsemé ça et là de quelques albums et de quelques livres, Andrew Bird est là avec sa pochette bizarre, incompréhensible, un peu benête, couleur soupe au potiron, il est avec le premier album des Clap Your Hands Say Yeah mon album à la pochette orange préféré. Je ne pense pas que cet album s'écoute à un autre moment qu'en automne ou alors si mais ce serait ne pas tout comprendre de sa musique. Cet album n'est compréhensible qu'avec le froid et ce n'est pas bien compliqué de se laisser bouleverser par ses mélodies audacieuses et sa joie simple en carton pâte. Le lecteur de ce blog ne saurait y échapper.
Andrew Bird - Sovay
Andrew Bird - The nervous tic motion of the head to the left

Andrew Bird - Masterfade




samedi 15 novembre 2008

toutes les familles sont psychotiques




La grande soeur passe ses journées dans le jardin à écouter du métal en maillot de bain et en grosses bottes, on dirait Lara Croft, elle a toujours les cheveux humides, elle prend sa douche avec son petit frère avec ce manque de pudeur entre eux qui caractérise les familles plus liées que la nôtre, j'ai rarement vu une actrice aussi belle.
La petite soeur complexée avec des pulls drôlement trop petits pour elles et aux motifs d'un autre monde, surdouée, sosie féminin de l'ado dans Little Miss Sunshine,
La mère qui même si elle habite au centre de nulle part trouve à s'habiller comme sur les podiums, ses chemises de nuit, ses boucles miel plantées sur la tête, son souvenir me laisse un goût sucré en bouche.
Le petit garçon, noyau de la famille et qui me rappelle Emile à ses heures les plus intrépides,
Le père, épais, barraqué, classe, travailleur, protecteur, l'attitude rock'n'roll comme on peut l'envisager en 2008.

Première partie : le film se passe au milieu de nulle part, deuxième partie : il suffit de rouvrir une route pour qu'on localise la famille et qu'elle perde sa liberté, ses privilèges, son autarcie, ce n'est plus qu'une maison qui défile devant les yeux du conducteur, dézoomage, on est regardé de l'extérieur, on est vu comme pas à notre place là où on s'est toujours senti à notre place, mais il est hors de question de partir quand "on est bien ici". D'abord rapproché les objets du jardin près de la maison, et puis ne pas faire jouer le petit trop loin, et insensiblement finir par se claquemurer dans la maison.
La mère pète un cable à cause du bruit et les deux gosses coincés de l'autre côté de l'autoroute flippent pour leur santé en mordant dans des pains au lait préalablement défoncés par les voitures, la plus grande se fait klaxonnée par les camionneurs, le père se tient là, robuste, il rythme les journées, permet à la famille de ne pas trop se perdre dans son isolement, il lui ramène des nouvelles du monde sous forme de cartons remplis de provisions, des denrées qui viennent de chez les hommes. Il y a quand même la radio qui tisse un dernier fil entre la famille et le monde, la télé, parfois, dont on ne retient que sa lumière bleue sur les visages de la famille, c'est d'abord ça la télé.
Pour le spectateur les échelles de valeurs s'inversent : le bien-être de la famille importe plus que l'intérêt général. Entre l'autoroute et les scènes familiales il faudra choisir.
Les grandes forces du film : le charisme américain des acteurs, les scènes de salle de bain, le spectateur qui passe du bien-être Candia à la folie douce. Quelque chose comme le meilleur film français que j'ai pu voir depuis le début de l'année.

mercredi 5 novembre 2008

Paris, Texas - Wim Wenders



Au début je croyais à un film qui partait de Paris pour arriver au Texas, quand j'ai vu que le film commençait au Texas, ou disons plutôt dans un endroit qui ne pouvait être Paris (je connais un peu cette ville et je sais qu'il n'y a pas de désert) je me suis dit "ah, tiens, mais, peut-être que "Paris, Texas" sonnait mieux que "Texas, Paris", ce qui est le cas, mais on se rend vite compte que pas une seule fois il n'est question de la capitale et que le titre doit être pris au sens de la ville de Paris au Texas, je pense que c'était évident mais à mes yeux ça ne l'était PAS.

Je crois que j'adore Wim Wenders, suffit de jeter un oeil aux Ailes du désir pour réaliser que ce mec a tout compris à la vie, au cinéma, et au cinéma dans la vie et à la vie dans le cinéma et à comment on fabrique de l'émotion à partir de casting toujours nickel et d'une caméra. Esthétiquement c'est parfait : on a tendance à penser qu'un film aux belles images sera plutôt pauvre en dialogues, contemplatif, et que toute l'énergie du réalisateur se focalisera sur l'image, Wim Wenders, c'est le mec qui dit : ça va beaucoup parler mais ce sera quand même magnifique et ça ne compromettra pas pour autant le bon déroulement de l'histoire. Rien que les affiches, enfin, tout le monde a plus ou moins en tête l'affiche des Ailes du désir, peut-être moins celle de Paris, Texas. Il est question d'une femme habillée en rouge, une superbe nana, blonde cinéma, magnifique, qui n'a rien à voir avec le titre et qui apparaît très à la fin du film, cette image me hantait, à chaque fois que j'allais au Virgin je croisais le dvd, je croisais cette image, un monstre de fantasmes, un bac à sables pour l'imagination qui ne pouvait s'empêcher de construire des montagnes sur du rien, sur trois éléments : Paris, Texas, cette fille, c'était trop.

Un film de Wenders dure 2 heures, il est convenu de prendre ses aises, d'être bien installé, à la limite ce serait pas mal de le chopper au cinéma, je donnerai tout pour "Les Ailes du désir" au cinéma, la semaine dernière j'ai vu qu'il passait sur Paris "Paris, Texas" avec un orchestre en début de film, tout ça pour 12€, le prix du dvd. Bref.
C'est l'histoire d'un homme échoué dans un bar en plein désert, dans son portefeuille un nom avec un numéro, l'homme qui l'a retrouvé appelle ce numéro et tombe sur son frère. L'homme échoué avait disparu depuis 4 ans, il a un fils qui habite maintenant avec son frère et qui l'appelle papa, il a une femme disparue aussi. Le film est la réhabilitation de cet homme au sein de sa vie, il faut tout réapprendre, réapprendre à manger, à parler, à dormir, réapprendre à avoir des besoins lui qui n'en a plus, réapprendre à se souvenir, redevenir cet homme-frère et cet homme-père, réapprendre la tendresse et l'amour paternel, se réapproprier son fils, retrouver sa femme et puis se rendre compte que 4 ans passés tout seul auront eu raison de soi, j'aime cette femme et ce garçon mais que je ne veux pas me mêler à tout ça, je ne tiens pas à m'attacher, tout ça est beaucoup trop pour moi, un homme comme moi (et je me connais) ne mérite pas autant, est étranger à tout ça. Alors, sans me retourner, je prends ma voiture et je sillonne les routes, je suis un brave gars.
A la façon des Ailes du désir, le parcours de l'homme échoué est semblable à celui de l'ange, et pour Wenders c'est toujours une bonne occasion de revenir sur ces petites choses et situations de la vie que le cinéma et la littérature ne cessent de glorifier, dans les deux films l'apprentissage de la vie n'allait pas sans l'apprentissage du bonheur, la douleur ne peut se faire que dans la solitude, hors de la société. L'ange finissait par éprouver le désir d'être humain : Wenders voulait nous faire voir la vie des hommes vue par un autre regard tout aussi conscient et intelligent que celui de l'homme mais qui ne serait pas le sien : ce sera l'ange. Nous devenions ces anges qui regardaient ces hommes sans pouvoir les comprendre ni intervenir, ces anges qui demandaient à avoir des sens et des sentiments. Ce qui en résultait ce que l'homme avait de la chance et ne pouvait s'en rendre compte, Wenders nous offrait ce regard extérieur comme la prise de conscience de cette chance.
Dans les Ailes du désir, l'apprentissage de la vie/du bonheur donnait cette scène à pleurer où l'ange découvre le froid, le sang et le café, ici dans Paris, Texas cela prend la forme d'une vache qui rit qu'on mange à l'arrière de sa voiture avec son fils. Dans les deux cas les deux personnages intégraient la vie tout en gardant leur innocence, leur bonté, une certaine pureté, ils arrivaient à vivre sans pour autant finir comme des brutes blasées, sans rien perdre de leur altruisme et de leur curiosité, gardant cet émerveillement qui en temps normal quitte le corps adulte, et à l'heure où je vous parle on ne sait toujours pas qui sera le 44ème président des Etats-Unis, damn it.

vendredi 31 octobre 2008

Des nouvelles du Fordisme

Les nouvelles on dit que c'est des "récits courts", ce qu'on ne dit pas c'est que les nouvelles nous paraissent toujours trop longues. La nouvelle n'a déjà pas tellement d'ambitions, il manquerait plus qu'elle s'éternise. Richard Ford écrit des nouvelles quand il n'écrit pas des sagas, il a eu le prix Pulitzer pour son roman "Indépendance", en écoutant le masque et la plume j'avais mis tout en oeuvre pour retenir son nom et puis ensuite, j'avoue, j'ai acheté le Transfuge sur lequel il était en couverture. Richard en blanc, Ford en jaune, un nom de ricain qui promettait une écriture tout aussi américaine, merde, j'adore la littérature américaine.

Dans l'article on le comparait à Raymond Carver, petites fables du quotidien, le bonheur d'un bon café avant une journée de travail, la réconciliation du fils avec le pater familias, des trucs dans le genre, quand c'est bien fait c'est ce que je préfère, c'est ce sur quoi se rue en premier mon petit coeur littéraire adolescent, rouge comme la couverture de l'attrape-coeur (ok j'arrête), je réserve le reste de la littérature à des jours plus glorieux pour mon ouverture d'esprit (science-fiction, j'arrive).
Je saurai pas vous dire ce qui cloche chez Carver et chez Ford et chez Fitzgerald par la même occasion, je me sens pas dans un bon jour pour vous faire une critique constructive, quand je relis ce blog je me trouve globalement assez médiocre, je manque de méthodes, la situation initiale arrive difficilement à progresser et j'imagine que je n'ai jamais donné envie à quelqu'un de lire un livre ou de voir un film, à la limite j'ai dû vous réveler l'existence de tel groupe ou de tel écrivain et puis basta.
J'en parlais un peu plus bas, le problème est définitivement dans les personnages, en trois mots et demi ça pourrait se dire : ON N'Y CROIT PAS, tout simplement. Vous dire pourquoi, c'est un peu difficile, disons que ce serait comme si le visage de l'écrivain (un peu comme sur la couv de Transfuge) apparaissait en surimpression sur le décor ou encore mieux, comme si les personnages évoluaient, mais sans visages, c'est exactement ça, voilà, à la limite vous pouvez vous arrêter de lire ici => .

Chez Ford (ils vous offrent la clim, lol) le gros point fort se trouve dans la subtilité, la pensée rafraichissante au milieu de tout un décor un peu bancal et répétitif, chambre d'hôtel quand ce n'est pas la grande résidence d'Esther, avocate désabusée à la poitrine exprimant le contraire, qui plus est harcelée par son beau-frère, on s'imagine Ford dans sa grande maison en bois avec le drapeau américain qui slalomme dans le vent, appelant sa femme, "hey Rebecca, regarde, viens un peu, j'ai trouvé une phrase pas mal, pas mal du tout bébé", phrase qui 5 ans plus tard se téléporte jusqu'à Courbevoie, magie de la littérature sans intervention d'internet, wow,
exemple de phrase pas mal :

"Henry (l'américain, ndlr) aimait lire la presse canadienne, tout ces articles au sujet de ce qui allait de travers sans qu'il ait à s'en préoccuper"
"Le panneau vert était en vue. AEROGARE/AIRPORT. Quelle corvée de tout écrire en double"
ou encore, mais cette phrase est peu compréhensible sans ce qui précède, dites vous juste qu'il est au lit avec sa maitresse et qu'il pense à tout ces bons moments, le mec est un peu vieux :
"Et il pensa : où cela avait-il disparu dans ma vie? Comment le conserver? Puis il se dit : mais non. Cela ne se conserve pas. Tu le prends quand c'est offert".
Dans le contexte ça a forcément plus de gueule.
En fait, parce que ma pensée évolue assez vite, ce que ces écrivains préfèrent par-dessus tout, c'est revenir sur le passé de leurs personnages forcément chaotique pour expliquer le comportement actuel
ma femme m'a quitté avec mon jardinier => voilà pourquoi maintenant je fais des bêtises
Et puis ce côté "bilan de la vie" qui justifie la propension au renoncement qui (dés)animent les personnages, : on est tous foutus, on a fait des erreurs, le passé est le passé, jouissons de la vie, peu importe ce qu'il nous en coûte, peu importe si ça se fait de manière inconséquente ou encore "j'ai des responsabilités mais je dénoue ma cravate", bref une littérature pouvant se résumer en une très méchante utilisation d'une phrase de Dostoievski initialement réservée à Dieu :
"si le bonheur n'existe pas, tout est permis" et l'écrivain de retranscrire les défaillances, l'envers du décor.
Cherchez moi un livre américain (et vous en trouverez parce que je n'ai pas lu tant de livres que ça) qui ne parlent pas de ça et je vous envoie une lettre par la Poste avec marquée "tu as raison, je ferme ma gueule".

Finalement, je ne vous conseille pas de lire Richard Ford (en dehors de la première nouvelle de 4 pages, éblouissante, et qui figurera dans le prochain radio vernis, là encore je m'occupe de tout), un peu plus Raymond Carver qui fait office de maitre en matière de nouvelles, c'est pas non plus nickel mais au moins ça aura l'avantage de démystifier le personnage. Notons aussi que la couverture de Péchés Innombrables est honteuse, je la censure exprès pour témoigner de mon profond dégoût pour les éditions du Points qui n'ont jamais su faire les choses convenablement, autant pour les résumés que pour les couvertures, c'est assez catastrophique mais je me dis que, finalement, la couverture genre photo Getty Images est assez fidèle au contenu, un théâtre d'archétypes.

Péchés Innombrables - Richard Ford, Edtions du Points, 372 pages, 7,50€

dimanche 26 octobre 2008

The Great Gatsby - F. Scott Fitzgerald

Plusieurs fois j'ai pu lire que Gatsby le Magnifique était un pilier de la littérature américaine, c'est même écrit sur la 4ème de couverture. Alors je m'attendais à une sorte de l'Attrape-Coeurs volume II sauf que je trouve rien à vous dire sauf que c'est plutôt nul, plutôt chiant, en dehors d'un début prometteur et de 2, 3 passages tout comme il faut. Je sais pas si c'est spécifique à elle mais souvent le problème en littérature anglophone (on peut trouver ça chez Douglas Coupland) c'est que les personnages ont souvent du mal à décoller, à sortir du livre, ils restent applatis sur la page comme des autocollants, n'ont aucun relief, aucun visage, sont à peine ébauchés que l'écrivain les fait déjà évoluer à une allure folle. Dans le langage courant c'est ce qu'on appelle un mauvais livre ou comment une lecture vous fait la même impression qu'un gâteau qu'en temps normal vous adorez mais qui pour une fois serait foiré.






Tout de même, une page à retenir...


Gatsby le Magnifique - Francis Scott Fitzgerald, le Livre de Poche, 282 pages, 5€

dimanche 19 octobre 2008

Rest Now, Weary Head! You Will Get Well Soon ou comment j'ai réinventé la critique musicale un dimanche matin



J'ai reçu plusieurs courriers à la rédaction qui posaient toute la même question :
"Qu'écouterons-nous cet automne chère Murielle?". Oui bien sûr c'est faux, ma rédaction se limite à mon lit et aux lits des autres occupés et puis qui aurait besoin de moi en matière de musique? En tout cas, si je peux vous aider dans la quête du CD parfait je peux vous conseiller un CD auquel il faudra vous méfier.
Le groupe s'appelle Get Well Soon, en fait il s'agit d'un petit mec, berlinois, et si je ne m'abuse il possède l'autocollant promotionnel le plus chargé du moment,
Les Inrocks disent de lui "Comme si Thom Yorke chantait chez Beirut avec Arcade Fire et Eno à la production"
Et Volume, qui je le rappelle et le nouveau magazine exclusivement musical des Inrocks... "la grandeur détraquée de Radiohead, les espaces infinis de Morricone, l'outrance de Scott Walker..."
Get Well Soon est donc tout sauf lui-même, c'est un peu comme dire de Faïza Guène qu'elle est "la Sagan des banlieues", formule qui a l'avantage de parler à tout le monde.

Au premier abord le CD est plutôt joli, deux personnages se font un calin sur fond de tapisserie de mémé, artwork très proche du premier Arcade Fire. Les titres des chansons sont longs, ce qui est la preuve de chansons très étudiées un peu prise de tête, d'un univers bien à lui, compliqué, cérébral, peut-être même aux frontières de la folie. Mmh bien.
Le CD est bleu canard, c'est sympa, il faut le sortir de la boîte et le poser sur la platine comme on mettrait une pizza au four. Plusieurs écoutes sont à prévoir afin de faire plus ample connaissance avec l'univers si personnel de Get Well Soon.
Pour le détail des chanson, j'ai mis en place une méthode de classement brevetée pour éviter tout discours superflu, à vous de me dire si ça vous va


On en déduira qu'une grosse partie de l'album est a laisser tomber et j'ai toujours eu du mal à pardonner les morceaux en trop dans un album, ça fait genre le mec est plus porté sur le nombre de chansons que sur la qualité. Sortir un EP pour un mec ça doit être quand même frustrant, ce serait comme un écrivain qui n'arriverait qu'à sortir des nouvelles, l'impression que le talent est limité. L'album est un roman, on s'y engouffre, on en sort transformé, un EP c'est trop court, des nouvelles aussi, un court-métrage aussi, mais à choisir entre un EP parfait et un album inégal, oui enfin vous voyez.

02- You, Aurora, You, Seaside
09- Born Slippy (Nuxx)

"Reprendre du service" ; Je t'embrasse Murielle


J'ai envie de "reprendre du service" comme les gens disent, allez savoir pourquoi (comme ils disent encore). Néanmoins, je voudrais un peu philosopher, vous décrire ma vie comme murielle. Mais elle, elle le fait bien mieux.




Bon, j'aimerais attirer votre attention sur l'art joyeux, l'art positif et finalement, étant donné que la vie n'est par définition que tristesse. En effet, nous sommes voués à perdre tout ce que l'on chérit un jour ou l'autre, c'est ineluctable. Il n'est donc pas nécessaire de nous accabler encore plus.




J'en viens au pretexte de cet article : Victor Prouvé. Une exposition lui était consacrée au musée des beaux arts de Nancy. Ces oeuvres pour la plupart expriment une certaine joie de vivre, une certaine chaleur, et je pense qu'il est inscrit sur ces toiles que la vie vaut bien d'être vécue.


On y retrouve une certaine proximité, un certain confort et tout cela nous donne envie de nous débarasser des conventions, de l'inutile et d'aller à l'essentiel, au plus naturel et primitif de nous.




Et cette nature profonde, ne peut être que bonne. Du moins, les toiles de Victor Prouvé vous en donnent la conviction. Tout cela pour vous dire, que j'ai décidé de ne pas m'en vouloir d'aimer les choses simples, telles qu'un bon PDJ chez Paul au premier étage avec vu sur un tramway, qu'une ballade à vélo ou la contemplation du brouillard à 6H30 du matin.

dimanche 12 octobre 2008

Paris est une teuf - Ernest Hemingway

Commencer par lire "Paris est une fête" avant les grands romans d'Hemingway c'est un peu comme manger un yahourt aux fraises sans jamais avoir goûté le fruit fraise, c'est à dire qu'on passe à côté de la vérité et que si on prend pas conscience de ça on va se dire : Hemingway? Mouais.
Lire les oeuvres mineures d'un écrivain c'est un signe de faiblesse, un signe que les autres oeuvres sont encore trop immenses pour nous, qu'on en entend tellement de bien que là encore on a pas envie d'obéir, alors on prend des chemins détournés, plus confidentiels. Quand on a pas l'habitude on se risque à juger un écrivain à ses petites oeuvres "mineures" et intimes, et puis si on a de la chance on tombe sur un écrivain qui n'a pas beaucoup écrit et qui a écrit l'essentiel de ce qu'il avait à dire en trois livres, son oeuvre est alors plus facile à lire dans son intégralité.
L'écrivain type qui alterne roman important et roman confidentiel, pour moi ça reste Philippe Roth.
Il y a les grands romans : la tâche, la symphonie pastorale, portnoy et son complexe, la bête qui meurt, tout ça tout ça, et puis les autres, les mignons : tromperie, patrimoine, goodbye columbus, quand elle était gentille, etc. C'est vraiment ça, je veux dire on peut vraiment séparer sa bibliographie en deux, prêter un pseudonyme à une des deux périodes.
Ce genre de phénomène montre bien que l'écrivain est tout plein de choses bizarres, pas forcément opposées mais différentes, qu'il peut être grave comme rigolo, s'essayer à l'autobiographie comme à une immense fresque de l'amérique où le "je" ne se trouverait nulle part.
Bon je m'éloigne,
"Paris est une fête" est une sorte de roman découpé en petites histoires qui se sont toutes vraiment passées à Paris puisqu'on y croise Joyce, Picasso, Ezra Pound et tout plein d'écrivains de la Lost Generation, c'est même dans ce livre que le terme apparaît pour la première fois.
Que dire? et bien, si vous aimez le Paris des grandes brasseries et des petits cafés ça devrait vous plaire puisqu'il n'est presque que question de ça, de plaisirs simples (amour, gastronomie, amitié, rayon de soleil dans ta face) narrés dans une écriture tout aussi simple et souvent efficace mais un peu facile dans l'émotion, Hemingway est pauvre mais heureux puisque habitant à Paris et, quand même, "avec 5 francs par jour, à l'époque où pouvez vivre et même voyager". Voilà voilà.

Le livre en trois extraits :

1
"Quand le printemps venait, même le faux printemps, il ne posait qu'un seul problème, celui d'être aussi heureux que possible. Rien ne pouvait gâter une journée, sauf les gens, et si vous pouviez vous arranger pour ne pas avoir de rendez-vous, la journée n'avait pas de frontières. C'était toujours les gens qui mettaient des bornes au bonheur, sauf ceux, très rares, qui étaient aussi bienfaisants que le printemps lui-même."

2
"Vous pouvez acheter soit des vêtements soit des tableaux, dit-elle. C'est tout le problème. Sauf les gens très riches, personne ne peut acheter à la fois les uns et les autres. Ne faites pas attention à la façon dont vous êtes habillés et encore moins à la mode, et achetez des vêtements qui soient solides et confortables, et l'argent que vous aurez économisé vous servira à l'achat de tableaux."

3
"LA FAIM EST UNE BONNE DISCIPLINE
Il y avait de quoi se sentir très affamé, quand on ne mangeait pas asez, à Paris; de si bonnes choses s'étalaient à la devanture des boulangeries, et les gens mangeaient dehors, attablés sur le trottoir, de sorte que vous étiez poursuivi par la vue ou le fumet de la nourriture. Quand vous aviez renoncé au journalisme et n'écriviez plus que des contes dont personne ne voulait en Amérique, et quand vous aviez expliqué chez vous que vous déjeuniez dehors avec quelqu'un, le meilleur endroit où aller était le jardin du Luxembourg car l'on ne voyait ni ne sentait rien qui fût à manger tout le long du chemin, entre la place de l'Observatoire et la rue de Vaugirard. Une fois là, vous pouviez toujours aller au musée du Luxembourg et tous les tableaux étaient plus nets, plus clairs et plus beaux si vous aviez le ventre vide et vous sentiez creusé par la faim. J'appris à comprendre bien mieux Cézanne et à saisir vraiment comment il peignait ses tableaux, quand j'étais affamé. Je me demandais s'il avait faim, lui aussi, lorsqu'il peignait; mais j'en vins à penser que, peut-être, il oubliait tout simplement de manger."

PS : la couverture n'est pas vraiment celle qui s'offrira à vous au moment de l'achat, elle est mille fois plus moche et j'ai du mal à la trouver sur le net.

Paris est une fête - Ernest Hemingway, 241 pages, Folio, 5,04€

samedi 11 octobre 2008

Shadows - John Cassavetes (1959)


Shadows est sur beaucoup de points, sembable à The Savage Eye : même tentative des personnages de trouver une place dans la société sinon dans leur vie, même esthétique du néon monochrome, même quête désespérée mais exigente de l'amour. Ce film est le premier de John Cassavetes, on y trouve les bases de son cinéma à venir : l'art du bavardage creux, l'ivresse d'avoir trop parler, la femme entre les hommes, la cartographie des visages, les solitudes modernes, élégance désinvolte et classe américaine.
La situation finale diffère de peu de l'initiale : rien n'a bougé, rien ne bougera jamais, l'immensité de la ville et de ses possibilités écrasant toutes volontés du personnage s'en voulant de préférer les cafés aux musées. Jeunesse belle et fringante, impuissante et démunie par persuasion. 50 ans après, littérature et cinéma sont d'accord pour affirmer que le portrait de l'Amérique n'est pas encore tout à fait abouti. Ah ah

lundi 6 octobre 2008

Sous les manteaux, les corps.



J'ai conscience du succès de Christophe Honoré, j'ai conscience du succès de Louis Garrell, ça me brouille un peu la vue quand je regarde un film d'Honoré mais je sais que j'aime ça, "Dans paris" était un peu un chef-d'oeuvre, La Belle Personne est presque irréprochable.
En fait ce qui me gêne c'est ce sentiment d'exclusion qu'on peut ressentir en voyant ses films, il y a une bulle filmique avec des personnages divins et inaccessibles comme des gâteaux dans une vitrine, et Christophe essaye de nous faire passer ça pour une réalité, une réalité mieux que la nôtre mais qui pour quelqu'un dans le monde (plutôt dans Paris en fait) devrait exister, quelqu'un vit comme ça, vit comme dans les films d'Honoré, et autant de belles personnes réunies dans une salle de classe devrait être pris pour le fruit du hasard, ce n'est plus tout à fait "Entre les murs".
Christophe, lui, pense d'abord à sa gueule et à ce qu'il a envie de filmer et qui il a envie de diriger pendant des semaines, je me souviens avoir lu une interview de lui dans Transfuge, il disait comme quoi les adolescents d'aujourd'hui étaient extrêmement beaux, tu parles, si tu choisis d'exclure du mot "adolescents" les millions d'autres jeunes qui ne sont pas dans ton film, c'est sûr qu'ils sont tous très beaux ces braves gens.
Alors oui je dis irréprochable parce que le film hypnotise complètement le spectateur, on ne voit pas le temps passer, totalement charmé (au sens magique) par la vie améliorée des personnages. On en sort bien évidemment conquis mais frustré par cette vie qui est la nôtre et qui doit reprendre, car on ne peut s'empêcher d'établir des comparaisons entre un tel film et une telle vie alors qu'on sait très bien que c'est stupide, qu'un film n'est pas une vie même s'il s'en inspire tout en profitant de l'occasion pour mettre des ellipses là où c'est un peu moins intéréssant, le film trahit la vie, il lui dit "je vais vanter tes mérites" et finit par divaguer.
Parfois le contraire arrive, c'est à dire que la vie retient quelque chose du film mais "La Belle Personne" place la barre beaucoup trop haut pour qu'on ait l'idée de calquer quoi que ce soit du film, tout n'est beaucoup trop qu'une question de chance : le physique et la classe sociale des personnages, ce sont des choses difficiles à reproduire. Tout y est idéal, même les rapports qu'ont les élèves d'une même classe : les histoires s'entrecroisent et se percutent, on sort avec son voisin de table ou son professeur d'italien qui ne fait pas vraiment cours et tout le monde se comporte en adulte, alors que dans notre classe à nous certains ne connaissent même pas notre prénom.
Concernant la beauté des personnages, il ne s'agit même pas de "charme", le charme dissimulé d'un personnage qui finit par vous convaincre tout le long du film, non ici c'est la beauté, la vraie, la consensuelle, tellement de beauté qu'elle ne surprend plus personne dans le film, les belles personnes sont des personnes comme les autres, laissez les vivre en paix. Ajouter à ça les besaces Freitag, les sapes Apc et les fournitures Muji et "Day is done" de Nick Drake en guise de thème principal. Merde Nick Drake, il nous le pique aussi, on ne pourra même plus pleurer sur nos vies en écoutant de la folk de suicidé.





Pendant le film une meuf a gueulé extrêmement fort "VOUS ALLEZ FERMER VOS GUEULES DERRIERE, MERDE A LA FIN" s'adressant à un groupe de trois minettes certainement venue pour "Looooouuuiiiss". Finalement la réalité n'est pas si triste.

mardi 30 septembre 2008

"ché pas c'est parce que chui intéréssant"

Houellebecq revient en France pour la promo de son livre et accorde une interview à Marcolivier Fogiel, lui qui chez Ardisson avait fait comprendre qu'il ne l'aimait pas vraiment.
C'est le matin, Fogiel est en t-shirt gris et gilet noir, façon "je m'en balance je suis à la radio", Houellebecq persévère dans son look kaki et laisse pousser ses petits cheveux qu'il tripote. Pendant moins d'une demi heure on assiste à une sorte d'Ecole des fans à l'envers, le gamin qui pose les questions au vieux loup, les questions sont fogieliennes mais les réponses importantes.
On apprend que Michel doit arrêter de fumer (!!!) et qu'il n'a pas envie de rester pour écouter Philippe Besson parler de Jean D'Ormesson, parce que, dit-il de la façon la plus mignonne qui soit "chui pas encore très sociable".
Je trouve que la vidéo est assez incroyable, c'est toujours très poignant d'écouter Michel parler de lui, se confier sans réserve même face à un journaliste qu'il n'a pas l'air d'aimer mais à qui il semble pardonner.

En attendant une bonne critique d'Ennemis Publics, voici la vidéo

dimanche 28 septembre 2008

"Autant ouvrir un Starbucks dans ta tête"

Les grandes vacances d'été dans le New-York nettoyé de Giuliani, c'est le moment pour Luke Shapiro de vivre en accéléré et de découvrir l'amour, l'amitié, le sens de la vie et le rock en moins de deux mois. Luke a a peu près 18 ans et arpente la ville avec son chariot à glaces sur lequel est accroché son ghettoblaster qui crache du hip-hop 90's faisant office de bande originale du film, ce chariot dissimule en fait des kilos de sachets de drogues, c'est aussi comme ça qu'il peut payer ses séances chez son pote-psy-sosie de Bukowski, quant à l'amour, ça tombera sur la belle-fille de ce dernier.
Voici grosso modo le résumé de The Wackness, un film iniatique mettant en scène l'entrée en vie d'un jeune terrien plutôt insignifiant aux préoccupations universelles, beaucoup plus universelles que celles d'une mère précoce et au papa ultra compréhensif (Juno). Ici Luke est plutôt du genre puceau tardif et aux parents expulsés de leur appartement, côté coeur, Jonathan Levine redore le blason du coeur brisé comme unique façon de se sentir vraiment vivant.
Un film aussi important que parfait, aux vertus purificatrices et faisant largement la nique à toutes les bouses estampillées "cool" sous prétexte que la B.O serait tout droit sortie de l'Ipod d'un ado incompris.
Wackness est une petite bombe, le genre à n'exploser que dans une ou deux salles parisiennes, et ça c'est incompréhensible de chez incompréhensible.

mercredi 24 septembre 2008

Que je sois fusse

Ce qui me fascine chez Bégaudeau c'est sa discrétion, la façon qu'il avait eu dans son livre de ne pas mélanger vie privée et vie professionnelle, peut-être c'était aussi pour ça qu'il était chiant, ce livre. Je veux dire, j'aurai bien voulu savoir ce qu'il faisait après les cours, s'il regardait la télé ou mangeait des bananes, c'est ça qui manquait finalement, le voyeurisme.
Quand Bégaudeau parle de l'école il ne parle que de l'école, quand il fait de la docu-fiction, il s'implique et ne digresse jamais, c'est peut-être pour ça qu'il a fait de bonnes études, parce qu'il est rigoureux, qu'il faisait ce qu'on lui demandait alors que moi je pouvais pas m'empêcher de raconter ma vie dans mes copies de maths. Lui c'est quelqu'un de sérieux qui ne s'éloigne jamais de son objectif premier, et quand il s'éloigne ça ne dépasse jamais la cour de récré, dans le livre comme dans le film la seule scène extérieure est au début, quand il est appuyé sur le comptoir d'un café, qu'il appréhende mollement la rentrée, mais là encore, il est sûr de lui, il sait où il va.

Je suis très amoureuse de François Bégaudeau, là j'hésitais un peu, mais il n'y a désormais plus de doute, c'est peut-être pour ça que j'ai tant aimé le film. On ne juge pas son mec.
Déjà j'aime bien sa petite tête encastrée dans son gros cou, il me fait penser au papa dans les Indestructibles, et puis il porte des trucs bizarres, très simple, très fonctionnel, t-shirt et gilet en automne, t-shirt Celio en été. Couleur de base : kaki, gris, noir, blanc, rouge, beige.
Il porte même un jean, un jour une de mes profs m'a dit que les profs doivent absolument éviter de porter des jeans, mais Bégaudeau en porte un, ça le moule un peu. C'est vrai qu'on dirait qu'il est gay.

Les autres professeurs sont de vrais professeurs, je crois qu'une tête de prof ça ne s'invente pas, c'est à la fois impossible à repérer dans le métro mais d'un autre côté une fois qu'on le sait on se dit qu'ils ne pourraient pas faire un autre métier, ces gens-là.
Il y a surtout le prof d'histoire géo et la prof blonde et enceinte qui sont incroyables, cette dernière je l'avais vu réagir au film dans un reportage sur un JT, elle disait que ce film montrait bien qu'"on n'enseignait pas qu'à des abrutis", dans le film elle porte des robes légères mais bien moulées sur son corps, ses bras sont potelés.

Bien évidemment, dans le cinéma dit "naturaliste", tout le monde garde son vrai prénom alors Esmeralda s'apelle Esmeralda et Boubakar s'appelle encore Boubakar (j'ai un Boubakar dans ma classe de TL). Un petit paquet d'élèves se distinguent du tas, et si on y réfléchit un peu : c'est exactement comme ça que ça se passe en classe, ici l'élève se distingue à la fois aux yeux du public qu'aux yeux de la classe entière, il ne peut briller que par ses répliques et ne peut se faire détester que par ce même moyen. On se rend bien compte que la parole est libre, Laurent Cantet laisse carte blanche à ses acteurs comme un professeur laisse tacitement carte blanche à ses élèves. Comme le dit mon prof de philosophie "l'école est le seul endroit où on ne se soucie pas des conséquences de ses actes", le cinéma aussi.
Beaucoup de critiques ont dit qu'il s'agissait d'un film sur le langage, oui oui, mais si on y réfléchit deux minutes, l'école c'est surtout des pièces vides, des chaises et du langage. On le sait tous : c'est très pauvre une salle de classe et c'est ce qu'essaye de montrer le dernier plan du film. Les salles sont les mêmes, les enfants les traversent.
La classe c'est aussi le plus bel exemple des pouvoirs d'une présence humaine sur un lieu, ou comment trente élèves entre des murs réchauffent soudainement l'atmosphère. Ce film c'est aussi "voilà ce qui se passent tout les jours sur la terre, de dehors ça n'a l'air de rien mais à l'intérieur ça bouillonne, on malmène des stylos, on somnole, on proteste, on rigole un peu, on charrie énormément, et ça personne ne le voit ni ne l'imagine.". Petit miracle quotidien, à l'abri de tout. Quant à la mixité sociale, ça n'a toujours été qu'une question de hasard.

samedi 20 septembre 2008

"Non maman, je ne trouve pas le monde détestable"

De l'influence des rayons gamma sur le comportement des marguerites
de Paul Newman



On avait toutes les deux repérer le film dans nos Pariscope respectifs, le titre était long et rigolo, comme les aiment les français, les français aiment les titres longs, ça je le sais.

J'étais un peu déprimée par le week-end, je regardais New Wave dans mon lit, les stores fermés, un vieux châle sur les épaules, le coca light pas loin, j'ai pu enregistrer le téléfilm de Gaël Morel sur mon pc pendant que j'étais au cinéma, hier. Pouvoir enregistrer des émissions télé à même son ordinateur, ce n'est pas une très grande révolution, disons qu'il fallait que ça arrive. Bon il était 16 heures, j'avais prévu un cinéma en soirée avec Cécilia, j'espérais juste qu'elle n'y tenait plus, que d'un commun accord nous oublierions cette idée et qu'aucune de nous n'enverrait de SMS.
A 16h50 j'étais encore chez moi, à demander à Emile de me prêter ses Converse bleu marine (on fait la même pointure), à 17h30 je devais être à Saint Michel, j'en rigolais d'avance, c'était très naturellement impossible, tellement impossible que je prenais mon temps, je m'imaginais déjà traîner avec Cécilia en attendant la prochaine séance.

J'étais à Saint Michel pour 17h50, la séance était à 18h, on courrait à travers les gens, on passait devant les voitures qui voyaient deux petites filles courir en rigolant, j'essayais de raconter des trucs à Cécilia. On est arrivé à temps, à la Filmothèque t'as le propriétaire du cinéma qui t'accueilles et qui te demande si tu veux pas recevoir le programme dans ta boîte mail, je lui ai fait "en fait nous on achète Pariscope alors on voit le programme", "oui mais là vous l'aurez directement dans votre boîte....bon je vous laisse réfléchir". Je me sentais capable d'accepter, ça ne me dérangeait pas, peut-être même que c'était utile.

Dans la salle j'ai fait à Cécilia "ce truc il va me gêner pendant le film", en pointant du doigt la Marylin d'Andy Warhol (un artiste américain) because on est trop contre le pop-art depuis qu'on s'est rendu compte que notre classe ne connaissait et n'aimait donc que ça en art moderne.

Je ne connais pas bien le cinéma des années 70, dans ma tête je reste bloquée au "Lauréat" qui est, si on me le demandait, un de mes films préférés. Le film ressemble à bien des égards à "A Swedish Love Story", il se passe dans la même décennie, s'essouffle un peu vers la fin et il y a ce même personnage de la petite fille blonde et pure qui déchire l'écran, à chaque plan on essaye de déceler une once de malveillance, de sournoiserie et on ne trouve jamais rien, elle est juste là, blonde, un peu malmenée par ses parents, impassible, aimant la vie, aimant sa mère, un petit crystal adorable au look joliment preppy. Et puis la plus grande, la plus fascinante, celle sur la photo, sa vie est magnifique, elle a toujours les jambes tordues, perchées, sur des meubles, elle boit du coca dans des bouteilles en verre, elle fait ses ongles, ignore ce qu'est internet, peut se permettre de détester les vieux, a un petit copain, a vraiment tout pour elle et un look à vendre sa penderie sur Ebay. Il faut aussi un peu parler du bordel décomplexant pour nous qui s'impose dans tous les décors du film, de la maison au jardin en passant par les salles de classe, des mines d'or pour les antiquaires et accros de vintage. C'est surtout la cuisine qui est crade, tout y est terreux, poussérieux comme un grimoire en dehors de la brique de lait fraîchement achetée, pas encore viciée et qui fait contraste. C'est une maison qui semble à l'abandon, vide mais débordante d'objets accumulés et où les corps féminins de la famille évoluent en chemise de nuit et robe de chambre, les pieds froids, jolies comme des coeurs, crades comme des hommes. Elles n'ont pas l'air totalement installées, la mère passe ses journées à lire les petites annonces, à la recherche de quelque chose pour elle, dans ses moyens, poussant parfois l'ambition assez loin pour aller repérer des locaux à louer pour son futur salon de thé, il y a cette accommodation à une vie un peu misérable qui n'est possible qu'à condition de croire en un avenir proche et plus beau, c'est un peu comme dans le Silence de Lorna. Une petit parfum aux essences de Norman Rockwell et de John Cassavetes, dans le genre "femme du réalisateur comme muse ultime". Ce qu'on y voit est d'ailleurs essentiellement un monde de femmes, des jeunes, des très vieilles et quand il y a des hommes on les soupçonne d'être gay.

Après le film on est allé manger des falafels, j'ai repéré des super bottes dans une vitrine, et un super sac dans une autre vitrine, puis on est allé au Mcdo, Cécilia a pris un Banania et moi un Coca Light. On a discuté jusqu'à 22 heures, de love et de cinéma, avec Cécilia on aime bien les films comme celui qu'on venait de voir, à la frontière de l'idée qu'on peut se faire d'un film d'auteur tout en restant divertissant, le cinéma "du milieu" comme on l'appelle. On est rentré chez nous, peut-être demain on ira voir La Belle Personne mais on a un contrôle d'histoire à réviser, on verra bien.

vendredi 19 septembre 2008

Contre une vie de couple plan-plan : tournez des films



Quand je tombais par hasard sur un film d'Agnès Jaoui ça se passait surtout en été, au Liban, et sur TV5. Je crois que j'étais un peu fascinée par elle, elle a quelque chose de dur qui m'effraie un peu, qui fera qu'elle n'acceptera jamais qu'on soit amies. Et puis aussi je la trouvais trop belle avec ses cheveux longs, un peu moins maintenant, maintenant elle a grossi énormément et elle a une coupe un peu moche, disons qu'elle s'est rangé, mais on sait que c'est encore elle, parce que son visage reste. Pendant le film j'ai pensé que, c'est vrai les cheveux longs ça rend moins strict un visage, ça peut s'interpréter comme du laissez-aller.

Jamel Debbouze est bien habillé dans le film, je pense qu'on n'a rien imposé aux acteurs, "choisissez 3, 4 tenues pour le tournage et qui correspondent si possible à votre personnage", on a dû leur dire ça et Jamel a choisit quelques polos Lacoste, des chemises, des jeans et des vestes de sport sombres plus une veste en cuir. Pendant le film on le regarde et on se dit "il est marié avec Melissa Therriau, ils doivent trop s'amuser"

Quant à Jean-Pierre Bacri j'avais l'image d'Agnès Jaoui qui disait à la caméra "Jean-Pierre pour moi c'est le meilleur acteur du monde", je viens de voir qu'ils sont en couples, ça m'impressionne, j'ai entendu dire qu'avec ce film ils en étaient à leur septième collaboration. Bacri est assez beau gosse, peut-être que les scènes qu'ils tournent ensemble amplifient l'amour qu'ils ont l'un pour l'autre, surtout quand Bacri en embrasse une autre.

Il y aussi la serveuse qui travaille dans l'hôtel de Karim (Jamel), je la connais, elle jouait dans Extension du domaine de la lutte, on avait dû lui demander de surjouer parce que jouer aussi mal je ne pense pas que ce soit possible, mais chez Jaoui elle se rattrape grave malgré son nez qui est extrêmement droit, ça c'est un peu stressant.

En dehors de ça, et bien, le film est exceptionnel. Pourtant j'y étais allée un peu "bon c'est vendredi, faisons quelque chose, ramenons une copine avec nous", Marie est venue, elle avait l'air un peu triste, personne ne voulait aller avec elle à la Technoparade, moi je ne voulais pas y aller du tout, la dernière fois c'était il y a 3 ans, j'étais avec des amis d'internet et on s'était retrouvé par hasard au centre de l'effervescence, des bouts de verre de bouteille de vodka m'avait frôlé, ça m'avait pas trop plu. J'aimerais bien savoir quel âge à Jaoui.

jeudi 18 septembre 2008

Brave gars

J'ai presque un défaut, un défaut qui ne gêne que moi (beaucoup de mes défauts ont cette caractéristique-là, c'est une de mes qualités): quand une émission coul passe à la télé et que je suis claquée je préfère tenir encore un peu grâce à mes réserves d'énergie cachées et regarder l'émission en question plutôt que de dormir. Une bonne émission ça me tient toujours en éveil. Hier quand j'ai appris que Bégaudeau et Laurent Cantet seraient chez Taddéi je me suis arrangée pour être à l'heure au rendez-vous : en pyjama, les devoirs faits, la douche prise, la bouffe au fond du ventre, les réveils programmés. Tout était bien.
L'entretien était ensorcelant, un vrai petit gâteau au chocolat pour le cerveau. D'un côté Laurent Cantet et sa tête qu'il n'arrête pas de secouer, de l'autre, Bégaudeau qui lui n'arrête pas de la pencher, au milieu, Fred qui a comme à son habitude overbossé le sujet.
Le miracle : l'éloquence inégalable de Bégaudeau, sa façon si musicale de dérouler les vérités, de viser juste, autant dans ses idées que dans le choix de son vocabulaire, le recul sincère et évident qu'il possède par rapport à l'ensemble du lot que constitue "Entre les murs" : le livre, le scénario, son jeu d'acteur, la Palme d'or.
Autant dans "Ca balance à Paris" j'ai toujours bien envie de le tabasser, autant ici je le trouve trop séduisant, à croire que ça réussit toujours mieux aux gens de créer plutôt que de commenter les créations.
Le lendemain, sentant que j'allais être interrogée en philo je me suis donné du courage en pensant à la rhétorique de François, en me promettant de l'imiter si jamais le prof annonçait "Mademoiselle Joudet, je vous écoute". Finalement c'est tombé sur Rafael, je me suis penchée vers Julie et je lui ai susurré "j'en étais sûre...c'est parce qu'il est arrivé en retard".

La vidéo de l'émission



Entre les murs, le livre

L'idée du livre était assez simple: une année, une classe, un prof de français, un point de vue. Faire le bilan d'un milieu qu'on imaginait en crise, comme le reste, en crise et d'une crise à la mode, qui pouvait intéresser. Le résultat était un peu faible, assez inutile, proche du degré zéro de l'écriture et surtout du degré zéro de l'effort d'écriture, dépassant rarement celui du simple procès verbal : constatations, déclarations d'une situation.
Tout s'éclipse devant ça, même le style, et sous prétexte que François donnait déjà beaucoup en choisissant le prisme illusoire du réalisme il ne fallait donc pas lui en demander plus, l'objectivité, si rare de nos jours, encore plus rare quand on parle de ce qui se passe "entre les murs" d'une classe, suffisait à justifier son projet. "Il n'y a pas de style mais il y a autre chose", et le lecteur qui baille entre les...lignes. La réalité n'a pas de style, c'est peut-être pour ça qu'elle est si chiante, et de me rappeler une phrase de Matzneff, "Un écrivain c'est une pensée soutenue par un style". Ouais je sais elle est coul.

Entre les murs - François Bégaudeau, 289 pages, Folio, 6,30€

vendredi 12 septembre 2008

La possibilité d'une île de Michel Houellebecq



Ce blog avait été assez vieux pour faire une critique du livre de Michel Houellebecq, "La Possibilité d'une île", un livre que j'avais lu avec la crainte de ne pas y retrouver la perle incrustée dans les précédents, un livre qui m'avait énormément plu et qui avait comme principal souci de changer la recette initiale, l'ambition de prendre le parti du roman d'anticipation.
Des articles dans différents magazines prouvaient bien qu'il y avait tournage, on a d'abord su qui serait l'acteur qui incarnerait Daniel1/Daniel25 puis la rumeur un peu moins vraie d'une bande originale composée par Iggy Pop, puis Première avait lâché un de ces journalistes sur le lieu du tournage, l'article témoignait d'un réalisateur taciturne, peu enclin à faire la promo d'un film inabouti mais ouvrant volontiers un blog officiel pour l'occasion.
1 an plus tard les affiches sont accrochées, ici et là des interview fleuve de Michel comme l'unique façon de faire parler cet écrivain assez bien placé au-dessus du reste. Et puis déjà les titres "la possibilité d'un bide", des trucs dans le genre, les critiques en sont fiers, jamais un film ne leur aura offert un si grand choix de calembours, une belle brochette de bouffons.

C'est donc un pain aux raisins dans le sac pour pas me faire choper par les employés de l'UGC que je m'en vais voir un mercredi après-midi "la Possibilité d'une île", film réalisé par un certain Michel Houellebecq me dit-on dans l'oreillette.

Le film, brièvement

D'un côté l'ambition d'un écrivain borné qui après le très allemand et moyen "Particules Elementaires" et le sans faute d'"Extension du domaine de la lutte" ne veut plus voir devant la caméra d'un étranger se dérouler ses propres romans. De l'autre côté, ce petit film d'1h25 timide et décousu qui aurait tout aussi bien pu tenir sur trois heures tellement les thèmes du livre était variés, presque infinis, on aurait alors pu assister, si cela avait été bien fait, au déploiement d'un film total et générationnel, ce à quoi aspire l'oeuvre littéraire de l'écrivain. L'effort colossal d'imagination et de recherche mis en oeuvre dans le roman, pensais-je, se serait traduit dans le film par des moyens financiers tout aussi colossaux.

Le résultat est qu'il y en a pas, jamais un film n'avait été aussi vide de sens, vide de tout, tellement vide que cela en devient apaisant. Ca dépasse de loin l'idée d'un film expérimental, d'un film ovni, ça dépasse aussi l'entendement. C'est douloureux à dire mais il n'y a strictement rien à faire, rien à extraire de ce film, et s'il fallait obligatoirement en garder quelque chose on retiendra une scène de concours de bikini ou une actrice africaine plongée dans la torpeur au milieu du désert.
Dites vous bien que je dis ça avec l'idée d'épargner le plus possible Michel Houellebecq, que je parle (toujours) à travers le prisme de l'admiration, tentant comme je peux de lui trouver des circonstances atténuantes, une gastro un peu trop tenace pendant le tournage, je ne sais pas moi, il doit bien avoir une raison.

mardi 9 septembre 2008

Be happy de Mike Leigh


C'est Poppy, un nom qui sonne rigolo pour une nana tout droit sortie d'un clip de Mika, le string orange et le soutien-gorge fuschia avec toujours des tas de trucs qui font gling gling glong sur les poignées et sa petite bande de copines fluokids. La bande-annonce nous promettait un personnage haut en couleur qui voit en toute occasion la vie du bon côté, une sorte de remède au pessimisme ambiant des anglais (le réalisateur a dû prévoir qu'il en était de même en France et dans le reste du monde) qui allait dès la sortie de la salle nous contaminer, on verrait alors d'un autre oeil les crottes de chien et les cimetières. (ça me fait penser à ce moment dans La belle au bois de Walt Disney où les trois fées transforment tout les obstacles qui empêchent le prince d'accéder à la tour où se trouve Aurore, les flèches deviennent des bulles, l'eau chaude qu'on lui envoit se déverse sur un arc-en-ciel, pitié que ce passage évoque quelque chose à quelqu'un)

Au début on redoute un peu le film consensuel qui prendrait la difficile relève de film comme Little Miss Sunshine ou encore Juno
il y avait dans ces deux films cette douce folie qui animait chacun des personnages, une folie rassurante : les personnages avaient tous quelque chose de bien à eux tout en restant profondément normaux, il fallait que ça reste cinégénique et que personne n'en soit effrayé. On s'identifiait très facilement et on avait l'impression qu'on était les seuls à les comprendre. Les situations étaient cocasses (oh le bus qui part sans la petite!) on riait beaucoup. C'est par des procédés aussi douteux et démagogiques qu'on réussit tant bien que mal à mettre tout un public d'accord.

Be Happy, malgré sa petite affiche fluokikoolol tente à chaque seconde d'échapper au consentement du spectateur avec des scènes bizarres et sans rapport les unes avec les autres, comme par exemple lors d'une longue scène où Poppy rencontre un clochard qui bredouille sans cesse la même phrase, ça dure bien 10 minutes, on ne comprend pas bien, il fait nuit, on se calfeutre dans son siège.
L'immense point fort du film reste quand même la très belle actrice, cette nana joue si bien que j'aurai du mal à croire qu'elle soit différente de son personnage dans la vraie vie, cette fille qu'on juge un peu simplette mais qui au final nous fait tous la nique parce qu'ayant réussi à vieillir sans rien perdre de sa capacité à s'émerveiller d'un rien, excellant dans le dur exercice qui consiste à faire le bien autour d'elle (de ses élèves de maternelle en passant par son prof de conduite), le film se détourne vite de l'optimisme dépaysant de Poppy pour esquisser l'ébauche un peu bancale d'un film social (sans domicile, enfant battu, racisme)

On peut aller voir ce film entre copines célibataires, il y a de quoi remonter temporairement le moral de celles qui n'arrivent toujours pas à se détacher de l'obsession d'acquérir le menu mari/foyer/enfant. J'ajouterai que c'est assez bien foutu, le réalisateur se plaisant à filmer le contraste Poppy/gris de la ville, c'est aussi blindé de couleurs qu'un tube de Smarties, et les fringues de Poppy sont à tomber. Une sorte de Carrie Bradshaw sans les moyens et beaucoup moins antipathique.

samedi 6 septembre 2008

Le Silence de Lorna



C'est Cécilia qui après les cours m'a demandé si je voulais aller le voir avec elle, on avait nous deux nos Pariscope dans nos sacs et elle m'a demandé "plutôt le soir? toi tu préfères le soir?" j'ai dit oui, j'avais l'impression que j'avais le temps pour une petite sieste avant la séance parce que l'année dernière je finissais à midi tous les vendredis et puis quand je suis sortie du dernier cours de la journée ça m'a étonnée qu'il soit 16 heures, si tard. Je suis rentrée chez moi, j'ai mangé un plat de frites, puis j'ai écouté John McCain parler sur LCI, McCain comme les frites, la coincidence de malade. Ensuite je me suis disputée avec ma mère et j'ai bu une tasse de café parce que je commençais à avoir sommeil, j'ai confirmé silencieusement le rendez-vous par SMS et on peut dire que c'était parti.

Dès le début on sent que l'histoire est un peu compliquée, qu'il va falloir ne pas faire l'impasse sur la lecture de tous les sous-titres, plusieurs histoires compliquées s'entrecroisent et se complètent, on en recueille des éléments et on finit par comprendre l'ensemble. Il y a Lorna qui se marie avec un camé (Jérémie Rainier qui m'a toujours fait l'effet d'un fils caché de Claude François), le corps sec est bronzé comme un nugget, il écoute Ghinzu sur son lecteur cd, demande "10 euros, pour les cigarettes" à Lorna qui garde et contrôle son argent à lui dans une enveloppe kraft, il est plein de bonne volonté, il veut faire la cuisine, arrêter la drogue "prends la clé avec toi, si je sors et que je vois les gens je vais retombé", s'achète un vélo pour 50 euros "je vais pédaler toute la journée, vers midi je peux venir te saluer? ça me fera un but dans la journée", tentant d'accomplir des activités qui collées les unes aux autres formeraient une idée du bonheur. Il n'arrête pas d'appeler Lorna, il a besoin d'elle, de ses mains il lui menotte les poignées, de ses bras il lui bloque les jambes, toujours en train de la tirer/l'attirer vers le bas, comme tout les hommes qu'elle croisera, sauf que lui il est pur et vulnérable, un peu sonné par la tristesse.
Elle, elle porte une doudoune cirée Esprit avec des hauts bizarres et moulants et un jean rouge "pattes d'éléphant" comme on disait en primaire, j'ai un peu le même qu'elle mais en velours côtelé, une coquetterie d'un autre temps, agréable à déchiffrer. Le soir elle tape silencieusement un SMS assise au bord de son lit un peu comme moi quand je réponds à Cécilia, et le bruit des touches nous berce, elle a deux grosses cuisses pleines d'eau et des seins comme des piqûres de moustiques, son petit sac bien calé sous le bras, elle donne vie et lumière à tout les objets qu'elle approche : le sandwich qu'elle mange, le sac qu'elle remplit de CD, la tasse bleue qu'elle porte a ses lèvres avec la cuillère qui gêne un peu le nez. Le choix de la caméra est tel qu'on en devine la lourdeur des corps et la texture des peaux.
A la fin Lorna échappe à la totalité du monde, elle n'a plus d'obligations, plus d'état civil, on ne sait pas très bien si elle est enceinte, elle a souffert comme une femme mais sa solitude est celle d'un homme, entre les arbres. Son histoire est plus importante que la nôtre. De la civilisation elle n'en garde qu'une autre doudoune cirée avec une moumoute sur le col, elle s'allonge sur un banc dans une cabane et laisse danser les flammes du poêle sur son visage. On entend trois quatre notes de piano, la seule musique que les réalisateurs s'autorisent, comme une faiblesse. Puis après c'est la fin, on sort en queuleuleu en se tenant les portes et en susurrant des "merci". Pendant une scène plus ou moins violente dans la salle une femme s'est levée et a commencé a parler toute seule, elle est restée peut-être 10 minutes debout devant l'écran. On a flippé, on était pas habitué.

mercredi 3 septembre 2008

Night and day et Woman on the beach de Hong Sang Soo



Je ne connais rien du cinéma coréen -ni d'aucun cinéma d'ailleurs-, je veux dire, je vois les films, je les juge très sévèrement, le processus de visionnage s'arrête au moment où je sors de la salle mais avec l'expérience je constate que ça m'apporte quelque chose, quelque de chose de transparent et de tout petit et qui dépasse de loin la limite qui sépare la salle de cinéma de l'extérieur, le silence du bruit. Parfois ça fait écho à des choses que je vois dans ma propre vie, j'en garde des répliques, des comportements, des idées de tenues vestimentaires, à force ça s'entasse, le cinéma en prend autant à la vie que la vie en prend au cinéma et les grains de riz constituent un bol, un bol consistant, nourrissant, visible, des influences pour écrire, pour mieux vivre, quelque chose se débloque définitivement dans l'esprit.

Le cinéma coréen, j'aimerais le connaître, je ne demande que ça, mais ça voudrait dire acheter des DVD à 30€, courir les minuscules salles de cinéma plus petite que l'écran, et puis il y a les a priori qu'on se fait sur le cinéma du monde, juste parce qu'il n'est pas de France ni des Etats-Unis il se dote tout de suite d'une charge intellectuelle disproportionnée, je veux dire, les distributeurs sortent rarement le Brice de Nice coréen, ils exportent plutôt des trucs qui plairont au duo MK2-Cahier du cinéma.

J'ai voulu rencontrer Hong Sang Soo parce qu'en fait j'étais allé voir The Savage Eye et qu'au MK2 il y a toujours plein de petits prospectus des films à venir que je pioche et que je lis bien calée au fond du siège avec un petit cigare, nan je rigole on peut pas fumer dans les cinémas. Je veux dire, certains ont les pop-corn, d'autres les prospectus de consolation.

Hong Sang Soo a sorti deux films sur deux mois, c'était un peu la saga de l'été, il y en a un qui date de 2007, son avion a eu du retard et il n'a pu venir que maintenant, le 20 aout, celui-ci c'est "Woman on the beach", et puis il y a Night and Day, sorti en juillet, le premier dur 2h15, le deuxième 2h30, les affiches donnent extrêmement envie.

Night and Day
c'est les rendez-vous de Paris qui s'accouple avec le Signe du lion de Rohmer, l'histoire d'un peintre qui ne tient pas un semblant de pinceau pendant tout le film (il préfère les cigarettes) et qui se voit obligé de se réfugier à Paris parce qu'il a fumé un joint dans son pays et qu'il risque d'aller en prison. Il y laisse femme et appartement, j'aime bien les films qui se passent à Paris, c'est la seule grande ville que je connais un peu, quand on parle de Paris on parle un peu de moi, on se rapproche géographiquement de mon lieu de vie.

L'acteur est un gros nounours extraordinaire et un peu bougon, tiraillé par ses envies de peloter les coréennes qu'ils croisent d'ailleurs l'affiche résume très bien l'affaire, l'acteur dérouté, interloqué devant l'Origine du monde de Gustave Courbet. c'est très drôle parce que dans ce film on a comme l'impression que Paris n'est peuplé que de coréens, comme si chacun se bornait à voir ce qu'il voulait dans la rue, par exemple moi je sais que je ne vois que les kiosques à journaux et les hommes un peu vieux, le reste je l'ignore assez pour le faire disparaitre.

Hong Sang Soo rigole un peu de lui-même, tourne en dérision ces quelques tentatives de lyrisme comme au moment où il filme un petit bateau de papier qui navigue dans l'eau qui coule dans le caniveau, emportant un caca de chien avec lui avec en bande sonore de la musique classique. Comme chez Rohmer il y a une opposition entre deux environnements, ici la plage et la ville.
Paris, son personnage n'en sort pas (du moins jusqu'à la fin), on pourrait éternellement vivre dans cette ville, on pourrait même se laisser aller à un parisianisme bien gluant même quand on est pas parisien (mais qui l'est vraiment?) et si on veut voir un peu de sable on conduit jusqu'à Deauville, on y passe la journée et on revient.

Et puis il y a ses dialogues hallucinants : les acteurs commencent à raconter n'importe quoi, les dialogues sont incohérents comme si tu coupais et mélangeais les questions et les réponses d'une interview, ils sont ivres d'avoir trop mangé, d'avoir trop bu, dégouté d'avoir trop mangé, d'avoir trop bu, baignant dans des vapeurs de riz chaud et de thé, ils savent qu'ils ne sont pas en train d'écrire l'Histoire alors ils en profitent et font n'importe quoi emportant dans leur danse le réalisateur. Night and Day est un chef d'oeuvre d'optimisme avec des scènes guillerettes mais bouleversantes.

Woman on the beach

En marchant vers le cinéma un mec de la croix rouge plutôt mignon est venu me demander "je vous accompagne quelque part?" je lui ai dit en souriant "si vous voulez, au cinéma" en pointant le MK2, alors il m'a fait "ça prendra 17 secondes", je lui ai dit "PAR CONTRE, je suis mineure", il m'a répondu "ah ok alors je te laisse tranquille", me crachant son tutoiement à la gueule, passant du séducteur-prosélyte à celui d'animateur de centre aéré, ensuite deuxième péripéties : j'ai confondu la caisse avec le stand de pop-corn, la caisse changeant une fois sur deux d'emplacement, mais la fille qui tenait le stand a été plutôt gentille.

Le film,
déjà il y a l'effort à faire, celui que HSS à fait en venant filmer à Paris tu dois exécuter le même en acceptant de voir un film qui se déroule dans une station balnéaire coréenne. Ici les mêmes codes que pour Night and Day, un homme pour deux femmes, croire en l'idée qu'on est plus que les seuls sur terre, le microcosme que l'on se construit mentalement, l'illusion de la fidélité, le problème féminin, choisir entre la possession tranquille d'une seule où l'ivresse de toutes les autres, la nourriture et le saké, les jambes des filles, blanches et froides, la dualité de l'artiste, tiraillé par ces deux pôles, l'un profondément animal, colérique, obsessionnel, impulsif, et l'autre : sage, génial et créateur, plus insoupçonné, et puis ces scènes miraculeuses d'intelligence qui jaillissent du film comme elles le font au sein de nos propres existences tièdes.

Un artiste (réalisateur) qui décide de prendre un peu l'air pour finir son scénario, emportant avec lui son ami chef-décorateur et sa petite amie (là encore le malentendu "mais je ne suis pas ton amie", "faut-il coucher pour sortir ensemble?", "je t'ai embrassé mais ça ne veut rien dire"), et puis peu importe si les statuts ne sont pas très bien définis, personne n'appartient à personne, l'important est de s'accrocher à la personne qui nous plait peu importe si elle est libre ou non, les gestes sont urgents et désespérés. Il n'écrira pas une ligne de son scénario ayant toujours mieux à faire, jusqu'à qu'il soit bloqué par une jambe cassée qui l'obligera à le finir en une journée.

Comme pour Night and Day, on ne comprend pas tout des dialogues et j'ai eu pour réflexe de mettre ces scènes de bredouillages incohérents sur le compte de l'exotisme d'un pays et d'une culture que je ne connais pas, dans celui-ci comme dans Night and Day beaucoup de choses restent inexplicables comme si quelque chose de trop français dans nos esprits restait imperméable à certains phénomènes. Un peu en dessous de Night and Day mais un pur ovni rafraichissant pour le spectateur profane.

Woman on the beach est encore en salle.

il faut occuper les occupés

ou peut-être que c'est ça ? les occupés sont tellement occupés qu'ils n'occupent même plus le web.

(ce que j'ai toujours aimé chez les occupés je crois que c'est le non-sérieux. je trouve ça vraiment admirable. sauf quand je lis des commentaires parfois, par exemple, sur mes articles un peu exécrables, d'accord : là je me dis que tout le monde n'a pas assimilé ce même principe de non-sérieux. et je finis par me demander si je n'ai pas vachement interprété. et la question se pose réellement quand il n'y a plus d'article ici depuis des mois, comme si c'était tellement sérieux qu'il fallait un truc super intelligent à dire pour poster. il ne s'agirait pas non plus de faire n'importe quoi. on a toujours ce même problème avec l'anarchie, ah ! "je fonde la première société anarchiste qui fonctionne : c'est moi". ce qui me ferait bander si j'étais Kant ce serait de me citer dans les dissertations, et de me faire dire ce que je veux.)

il est temps de vous présenter la plus grande chanson de tous les temps. OVER AND OVER, album "high time" des MC5 (il faut aussi écouter Skunk), 1971. je crois que le grand cliché sur cet album c'est qu'il marque la fin des MC5, qu'ils ne sont plus vraiment au top de leur forme, après "kick out the jams". mais sans aucun contexte, moi j'entends cette musique et je la trouve très puissante. peut-être un peu grossière. et ce contexte m'émeut. je pense à ces types qui ont écrit cette chanson et qui l'ont jouée, et ils y ont forcément consacré du temps, je trouve ça vraiment touchant. mon côté bon enfant bon public, parfois tout m'émerveille. mais surtout over and over et skunk aussi.




l'alarme du premier mercredi du mois - Paris, 12h10, 3 septembre 2008.

les occupés ne sont plus occupés

samedi 21 juin 2008

l'effet d'un éventail élaboré à partir d'une copie double



Vous avez vu, le soleil est vraiment très bien programmé, pile au moment où c'est l'été il nous sort son petit cul tout jaune. certains s'en réjouissent et roulent des hanches en Havaïnas sur les trottoirs mous de Paris tandis que d'autres beaucoup plus déprimés préfèrent rester chez eux pour ne pas risquer de croiser ces premiers, stores fermés, connexion wifi et Sprite Zero à portée de main.
Qui que vous soyez, je pense avoir une partie de la bande-son de ces prochains mois. Ecoutez moi bien

Au même titre que votre corps qui s'émancipe de votre joli pull bleu marine vos oreilles elles aussi ont droit à des choses plus estivales que du Joy Division, c'est pour ça qu'aujourd'hui je viens vous apporter la bonne nouvelle d'un album aux plages (ah ah) plutôt inégales mais dont certaines méritent vraiment votre attention,
cet album s'appelle Twenty One, comme l'âge de la majorité aux Etats-Unis,
le groupe : MYSTERY JETS,
des coiffures de merde, des clips trop rigolos, une pochette qui claque, un délire powerpoplol convenu et vu sur tout le monde mais que voulez vous, une bonne chanson est une bonne chanson, même jouée par un groupe qui risque de mourir dès demain.

C'est doux avec la peau, ça parle d'amour juvénile, ça fait plaisir à tout le monde même aux plus aigris d'entre nous
avec une boîte de cornet pistache chocolat, une paire de lunettes en toc H&M et une pile de livres de poche méticuleusement choisis votre été devrait normalement bien se passer.



jeudi 15 mai 2008

le sable n'existe plus



I
j'ai écouté l'album de MGMT pendant plusieurs jours sur un cd gravé, c'était plaisant, j'ai éprouvé diverses choses, j'ai réussi à ne pas les écouter en pensant au buzz, en pensant à l'autocollant promotionnel, les 4 premières chansons valent vraiment leur pesant de riz aux vermicelles mais je serai raisonnable et je m'arrêterai là pour ManaGeMenT (j'ai dû attendre de lire l'article sur Chronicart pour comprendre qu'il s'agissait d'une abréviation), ça m'a d'ailleurs donné des idées de noms de groupe, si un jour j'en ai un je l'appelerai TKT, pour T'inquiètes, toi même tu savais.
Avec les 10 euros et des paillettes que ça me faisait économiser j'ai acheté l'album de Crystal Castles pour environ 13,99€ au Virgin Megastore de la Défense vers les 17h30, cheveux bouclés et t-shirt rayé si tu passais par là, c'était bien moi.

CRYSTAL CASTLES
c'était il y a un peu plus d'un mois, je devais être en train de préparer mon sandwich pour le midi du lendemain, à la radio l'émission des musiques électroniques sur France Inter, le nom m'échappe, un titre passe, il traverse mon oreille distraite jusqu'à me prendre par surprise et m'émouvoir un peu. en temps normal je suis du genre à éteindre violemment la radio et à couper la parole à celui qui l'a mais exceptionnellement j'ai attendu que la nana prononce le nom du groupe qui passe en espérant qu'elle ne l'a pas fait avant le morceau ou qu'une deuxième chanson ne va pas suivre.
CRYSTAL CASTLES
nom de groupe impossible à retenir, je répète autant de fois qu'il faut les deux mots dans ma tête, je me visualise le truc, des châteaux de crystal, comme celui de Disneyland Paris à 1000 euros tout en crystal de Swarovski qu'on peut admirer dans une boutique qui se trouve dans le château même.
Quelques semaines après on en parle dans technikart, 4 étoiles sur 4, le gros carton, le truc qu'il faut écouté avant que ça arrive dans les colonnes de libération, encore un peu et on aura droit au live sur tracks, des choses comme ça. je n'ai jamais été une fan de musique électronique, je trouve que ça manque de quelque chose, de guitare ou de voix, je n'aime pas la musique qui me fait penser à un cardiographe. Parfois ça me complexe un peu, enfin non plutôt je n'aime pas savoir que mon éclectisme n'est pas si éclectique qu'il le prétend et qu'il est même franchement borné voire sectaire. enfin bon, je fais mon possible, je suis prête à sortir les billets, à me laisser impressionner, je suis finalement quelqu'un d'assez tolérant.

II
une fois chez moi, le cd déshabillé de son cellophane m'a fait pensé qu'à notre époque on peut ouvrir une boîte de thon en moins d'une seconde mais que pour les CD ça reste toujours une guerre qui mobilise ciseaux maped et ongles rongés. mais c'est finalement une des dernières joies réservées aux gens qui achètent encore des CD, l'impatience qui augmente, le CD qu'on fait tourner dans tous les sens à la recherche d'une issue possible, le cellophane qui s'enlève en un morceau, le disque neuf légèrement trop bien enfoncé dans sa matrice.
j'ai retrouvé cette chanson passée sur france inter, elle s'appelle Crimewave et est bouleversante, vraiment classe, comparable au "Night Drive" des Chromatics, un souffle froid et féminin, une tristesse robotisée, un morceau plein d'humilité, dépouillé, le pied blanc et tordu d'une fille qui souffre dans ses étroits talons, un building en hiver, un glaçon amer. Elle chante la mâchoire tiraillée par l'idée de la mort.
CRYSTAL CASTLES

http://myspace.com/crystalcastles

samedi 3 mai 2008

EN CIERLARQUE


(ci-dessus : "image sans aucun rapport pour mon article")




- je vais quand même pas prendre douze bouteilles de champagne
- mais si, on les aura
- mais c'est complètement fou on est quatorze
- écoute je les ai commandées, tu les prends et on les boira à une autre occasion

(et moi de calculer : ça fait un litre par personne) (oui il y en a deux qui ne boivent pas)

20h05 le premier invité arrive, puis, tout se précipite, même ceux qui arrivent délibérément un peu en retard sont là vers 20h30, les bouteilles de champagne s'ouvrent, on se fait des courtoisies, au moins vingt personnes me disent que ma frange me va très bien, je crois qu'on me l'aura presque autant dit que "Alice ? au pays des merveilles !" : "tu as une tête à porter une frange" "j'ai toujours su que tu te ferais une frange" "c'est évident qu'il te fallait une frange". Et du coup je suis presque gênée, les gens aiment mon petit barrage de cheveux, voilà, ils ne veulent plus aller plus loin, ça me va très bien. Il n'y a qu'une personne qui comprend et qui veut me la soulever, cette personne doit être la bonne, revenons au sujet principal.
Déjà quelqu'un présente son cadeau à mon père, alors il s'assied à la table du salon pour l'ouvrir et d'autres cadeaux arrivent, et moi-même je me dis qu'il vaut mieux que mon cadeau soit noyé parmi les autres alors je l'amène, ce n'est pas que j'en ai honte, bien au contraire, mais c'est qu'il est simplement peu consistant, comme dirait Juliette, "on ne dirait pas un cadeau" (mais je trouve ça un peu bébête). Ce sont les mémoires de Robert de Montesquiou, un dandy du début du siècle dernier, qui intéressait beaucoup mon père, et il a eu l'air très content que je lui offre ça, il a même précisé qu'à chaque fois qu'il entrait dans une librairie il regardait s'il n'y avait pas du Robert de Montesquiou, et même à la hune ils ne l'ont pas, et moi je vais à la fnac et je le trouve directement, posé là comme en m'attendant, je trouve même ça suspect, j'aurais aimé devoir le chercher longtemps, comme si cela avait pu donner plus de valeur à mon cadeau, seulement rien à faire, il est bien là à la fnac. Qu'est-ce que j'aime me permettre des phrases tortueuses sans presque aucun sens général, des phrases xénophobes, je les appelle comme ça depuis une seconde c'est leur nouveau nom : ce sont des phrases qu'un étranger qui aurait appris le français comprendrait mot à mot mais pas dans leur totalité, tellement elles sont incohérentes.

je ne sais pas ce que ça signifie mais j'ai toujours un problème à conjuguer le verbe "boire".
je réforme le français et décrète que dorénavant on dira :
je buvrai
tu buvras
il buvra
nous buvrons
vous buvrez
ils buvront



ma mère n'arrête pas de se plaindre elle a été "malade".

quelle idée !

vers 23h les premières personnes se sont mises à partir,
à minuit il n'y avait plus qu'un petit comité, quelqu'un a demandé à sortir le whisky, comme si 1L de champagne par personne + 9L de vin rouge et blanc ne suffisaient pas.

à 21h Georges a dit : "y'a pas d'ambiance !"

moi je trouvais l'ambiance plutôt cool, je ne sais pas comment mon père a fait mais le mode random ne passait que de bonnes musiques, du punk principalement, de mémoire il y a eu "Sex Beat" de Gun Club, la chanson la plus cool et punk que je connaisse, franchement, et puis "I wanna be your dog" des Stooges, "Guns of Brixton" et "Spanish bombs" des Clash, "Like a rolling stone" de Bob Dylan, une reprise de "Running dry (requiem for the rockets)" de Neil Young, "(I'm) stranded" des Saints, peut-être quelques chansons de The piper at the gates of dawn de Pink Floyd avec Syd Barrett. Mon père m'a dit qu'il avait fait un mix, il ne faut pas croire trop au hasard quand même c'était trop beau.

- maman, j'ai mal au ventre depuis deux jours
- ça te fait quoi ?
- ben ça fait mal et ensuite ça part et puis ça revient
- (elle fait un mouvement de contraction) ça te fait comme ça ?
- oui voilà. ça fait comme ça quand on est enceinte ?
- oui ça fait mal comme ça mais encore plus
- ça doit être dur quand même
- si j'ai pu l'faire c'est que tout l'monde peut l'faire !
- c'est vrai.
- tu verras toi quand t'auras des enfants !
- pourquoi "des" ?
- ben peut-être que t'en auras plusieurs non ?
- non moi j'en veux qu'un, je veux qu'il vive comme un enfant unique. en fait j'en veux bien deux mais alors il faut qu'ils vivent dans deux maisons séparées et sans se connaître ! et puis si j'ai des jumeaux je vais quand même pas en tuer un pour que l'autre soit enfant unique mais bon... en fait je crois que les enfants il faut en avoir un ou huit, parce que si t'en as huit t'as quand même une petite chance d'avoir un prodige ! mais huit... c'est un risque à prendre, huit ! ça fait huit fois plus de stress, au moins un seul tes préoccupations sont centralisées...
- oui c'est vrai mais si t'en as qu'un, t'as que ça... tandis qu'si t'en as deux, bon, si t'en as un qui y passe, bon, t'en as un autre !

j'ai découvert la liberté en écriture récemment. c'est quelque chose qui a l'air absolument évident mais en fait pas du tout, il a fallu que quelqu'un le fasse pour que je me rende compte à quel point c'était facile. c'est vrai quoi pourquoi ne pas s'arrêter au milieu d'une histoire et en raconter une autre ainsi de suite tant que le tout tient la route, ce que, bon, c'est vrai, pour le moment, on ne peut pas affirmer.

aujourd'hui mon père a 50 ans.

Gemma a appelé à neuf heures pour le lui souhaiter. J'étais dans la cuisine en train de me la couler douce, à laver des coupes de champagne en regardant par la fenêtre. Je sentais l'auto-contentement monter en moi, un camion poubelle du samedi matin est passé comme pour me le confirmer (j'adore entendre les camions poubelle, en général ça veut dire qu'il est tôt), et le téléphone s'est mis à sonner, j'ai bondi pour décrocher avant qu'il ne sonne une deuxième fois, je ne voulais pas que mes parents soient réveillés. C'était donc Gemma, qui s'excusait d'appeler tôt, mais qui voulait souhaiter un bon anniversaire à mon père. J'ai ressenti beaucoup de choses en même temps, je l'ai détestée pour avoir formulé le joyeux anniversaire avant moi, ce n'est pas que je ne le pensais pas mais je ne l'avais juste pas dit à haute voix et j'ai eu l'impression qu'elle me l'avait volé. En même temps j'avais l'impression d'être dans son roman, parce que l'autre jour j'ai lu son roman, et il y a des histoires de femmes et de maisons de campagne et de téléphone qui permet de connecter les femmes et les maisons de campagne. Elle m'a dit qu'elle partait pour une maison dans la forêt, j'ai vraiment pensé très fort à ce qu'elle écrivait, je me suis dit que peut-être qu'il y aurait des drames là-bas et je l'ai enviée. Dans sa voix, quand elle m'a dit qu'elle était désolée d'appeler tôt, j'ai trouvé quelque chose de différent, je l'imaginais hésiter avant d'appeler et le faire finalement comme sur un coup de tête. Et quand je me suis mise à essayer de parler, que j'ai avancé que j'avais lu son article pour machin, j'ai senti que j'avais écoulé tout le temps qu'elle m'autorisait à parler, alors je n'ai même pas pu lui dire que j'avais lu son roman et le lui commenter, mais dans le fond ça m'arrange. C'est curieux, il n'y a rien de plus intime que de lire quelqu'un, je veux dire, ses mots. Et l'intimité se renforce lorsque c'est un livre publié et destiné à tous en général, parce que les choses ne sont pas personnalisées, l'écrivain n'a plus le même rôle que lorsqu'il est face à soi : il joue un deuxième rôle, le public. Ce qui permet d'en savoir plus sur lui ; c'est un honneur. J'adore le fait que la relation soit à sens unique. Le lecteur se sent à la fois frustré parce qu'il voudrait bien que l'auteur le connaisse autant qu'il le connaît et très supérieur parce qu'il sait des choses sur l'auteur qui lui ne sait rien. L'écrivain est un être généreux, et courageux.



Je vais me faire un thé.

Quelle journée splendide.
Je m'en veux de m'écouter autant, de me laisser mener par le soleil et la pluie. Seulement voilà je n'arrive vraiment pas à faire autrement. Ce soleil me rend folle de joie je n'ai pas été aussi heureuse depuis deux semaines. Il faudrait faire plein de choses mais la culpabilité s'est éclipsée, pour une fois j'arrive à vivre dans le présent. Ce matin, vers 10h, après la vaisselle, je me suis assise à la grande table encore dépliée de la veille encore apposée contre le mur pour servir de buffet. Il y a des chaises partout on dirait qu'un ouragan est passé par là. C'est différent de d'habitude, c'est un jour spécial. J'ai pris mon ordinateur et je l'ai posé là, j'ai pris le sac de fromage auquel on n'avait quasiment pas touché hier et une baguette de pain intacte et j'ai mangé à outrance en écrivant librement comme j'aime. Abondance : c'est le mot qui colle. Il n'y a rien de plus agréable que l'abondance. En vérité ça ne fait pas tellement consommer plus, il y a des gens qui l'ont compris et qui proposent des buffets "illimités", et "tout le monde y trouve son compte". C'est ma nouvelle maxime, tout l'monde y trouve son compte par çi, par là, tout l'monde est heureux comme ça dans l'meilleur des mondes etc.

Et hier soir à papoter au téléphone allongée dans le noir de ma chambre avec ma coupe de champagne, qu'est-ce que j'étais bien. Le pied, vraiment. Les pieds en l'air contre ma fenêtre, les bras coincés dans les pieds d'une chaise retournée, à gigoter sur la moquette. Je pense que regarder les étoiles au petit matin à côté de braises du feu passé n'aurait pas été plus agréable. Pourquoi me suis-je mis ça en tête, maintenant j'en meurs d'envie.

Voilà, si vous lisez cette phrase, merci d'accepter mon existence. Je suis très heureuse d'avoir pu parler un peu de mon bonheur éphémère, délibérément je n'ai pas employé le mot "partagé" parce que je doute d'être parvenue à l'étendre jusqu'à vous, tout au contraire, je me vois bien vous avoir crispés à lire toutes ces conneries, mais ça m'amuse aussi de toute façon ! J'ai décidé de tuer la honte, et d'ici deux siècles il n'y aura plus de définition dans le dictionnaire ! Et je tuerai aussi la retenue, à terme. Vaste programme.

Les Occupés sont