samedi 20 septembre 2008

"Non maman, je ne trouve pas le monde détestable"

De l'influence des rayons gamma sur le comportement des marguerites
de Paul Newman



On avait toutes les deux repérer le film dans nos Pariscope respectifs, le titre était long et rigolo, comme les aiment les français, les français aiment les titres longs, ça je le sais.

J'étais un peu déprimée par le week-end, je regardais New Wave dans mon lit, les stores fermés, un vieux châle sur les épaules, le coca light pas loin, j'ai pu enregistrer le téléfilm de Gaël Morel sur mon pc pendant que j'étais au cinéma, hier. Pouvoir enregistrer des émissions télé à même son ordinateur, ce n'est pas une très grande révolution, disons qu'il fallait que ça arrive. Bon il était 16 heures, j'avais prévu un cinéma en soirée avec Cécilia, j'espérais juste qu'elle n'y tenait plus, que d'un commun accord nous oublierions cette idée et qu'aucune de nous n'enverrait de SMS.
A 16h50 j'étais encore chez moi, à demander à Emile de me prêter ses Converse bleu marine (on fait la même pointure), à 17h30 je devais être à Saint Michel, j'en rigolais d'avance, c'était très naturellement impossible, tellement impossible que je prenais mon temps, je m'imaginais déjà traîner avec Cécilia en attendant la prochaine séance.

J'étais à Saint Michel pour 17h50, la séance était à 18h, on courrait à travers les gens, on passait devant les voitures qui voyaient deux petites filles courir en rigolant, j'essayais de raconter des trucs à Cécilia. On est arrivé à temps, à la Filmothèque t'as le propriétaire du cinéma qui t'accueilles et qui te demande si tu veux pas recevoir le programme dans ta boîte mail, je lui ai fait "en fait nous on achète Pariscope alors on voit le programme", "oui mais là vous l'aurez directement dans votre boîte....bon je vous laisse réfléchir". Je me sentais capable d'accepter, ça ne me dérangeait pas, peut-être même que c'était utile.

Dans la salle j'ai fait à Cécilia "ce truc il va me gêner pendant le film", en pointant du doigt la Marylin d'Andy Warhol (un artiste américain) because on est trop contre le pop-art depuis qu'on s'est rendu compte que notre classe ne connaissait et n'aimait donc que ça en art moderne.

Je ne connais pas bien le cinéma des années 70, dans ma tête je reste bloquée au "Lauréat" qui est, si on me le demandait, un de mes films préférés. Le film ressemble à bien des égards à "A Swedish Love Story", il se passe dans la même décennie, s'essouffle un peu vers la fin et il y a ce même personnage de la petite fille blonde et pure qui déchire l'écran, à chaque plan on essaye de déceler une once de malveillance, de sournoiserie et on ne trouve jamais rien, elle est juste là, blonde, un peu malmenée par ses parents, impassible, aimant la vie, aimant sa mère, un petit crystal adorable au look joliment preppy. Et puis la plus grande, la plus fascinante, celle sur la photo, sa vie est magnifique, elle a toujours les jambes tordues, perchées, sur des meubles, elle boit du coca dans des bouteilles en verre, elle fait ses ongles, ignore ce qu'est internet, peut se permettre de détester les vieux, a un petit copain, a vraiment tout pour elle et un look à vendre sa penderie sur Ebay. Il faut aussi un peu parler du bordel décomplexant pour nous qui s'impose dans tous les décors du film, de la maison au jardin en passant par les salles de classe, des mines d'or pour les antiquaires et accros de vintage. C'est surtout la cuisine qui est crade, tout y est terreux, poussérieux comme un grimoire en dehors de la brique de lait fraîchement achetée, pas encore viciée et qui fait contraste. C'est une maison qui semble à l'abandon, vide mais débordante d'objets accumulés et où les corps féminins de la famille évoluent en chemise de nuit et robe de chambre, les pieds froids, jolies comme des coeurs, crades comme des hommes. Elles n'ont pas l'air totalement installées, la mère passe ses journées à lire les petites annonces, à la recherche de quelque chose pour elle, dans ses moyens, poussant parfois l'ambition assez loin pour aller repérer des locaux à louer pour son futur salon de thé, il y a cette accommodation à une vie un peu misérable qui n'est possible qu'à condition de croire en un avenir proche et plus beau, c'est un peu comme dans le Silence de Lorna. Une petit parfum aux essences de Norman Rockwell et de John Cassavetes, dans le genre "femme du réalisateur comme muse ultime". Ce qu'on y voit est d'ailleurs essentiellement un monde de femmes, des jeunes, des très vieilles et quand il y a des hommes on les soupçonne d'être gay.

Après le film on est allé manger des falafels, j'ai repéré des super bottes dans une vitrine, et un super sac dans une autre vitrine, puis on est allé au Mcdo, Cécilia a pris un Banania et moi un Coca Light. On a discuté jusqu'à 22 heures, de love et de cinéma, avec Cécilia on aime bien les films comme celui qu'on venait de voir, à la frontière de l'idée qu'on peut se faire d'un film d'auteur tout en restant divertissant, le cinéma "du milieu" comme on l'appelle. On est rentré chez nous, peut-être demain on ira voir La Belle Personne mais on a un contrôle d'histoire à réviser, on verra bien.

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